Le cri de la louve

Publié le par hypos

Que sais-tu Nicolas, toi qui te pavanes dans tes habits de nanti, toi qui fait briller ta Rolex, toi qui t'offres un mariage de star et des dîners aux Fouquet's, toi qui peux sacrifier une fortune pour composer et recomposer ta famille, toi qui peux t'entourer de personnel domestique, que sais-tu de la vie des fourmis que tu prétends gouverner ?

Moi je sais Nicolas. Je sais le désir d'enfant cruellement contrarié par le manque d'argent, je sais la douleur d'interrompre une vie faute de moyens suffisants.
Je sais la joie d'être mère et la peur de ne pas s'en sortir. Les démarches entamées, dès la première échographie, pour trouver une place en crèche ou la nourrice compréhensive. Je sais les calculs faits le soir, la crainte au ventre, quand la colonne "dépenses" gonfle à l'envi et que la colonne "ressources" stagne.

Je sais le désir violent et soudain de pouvoir rester près du tout petit qui sera le dernier. Le besoin d'avoir plus de temps pour chacun alors que les heures s'enfuient en transport, dossiers, courses et ménage. Je sais ce que représente alors le congé parental, cette fenêtre de liberté qui nous permet de souffler, d'aimer mieux, plus longuement, plus sereinement nos enfants.

Je sais aussi la famille décomposée, les larmes, les déchirements, la prudente reconstruction. La porte qui s'entrouvre pour un nouveau venu, les relations subtiles entre l'enfant et l'inconnu, l'amour qui grandit mais achoppe, les échecs successifs, les nouvelles plaies qui saignent, les tensions, les non-dits. Le beau-père qui aime et qui rejette ensuite, les enfants qui adorent puis haïssent, les pénibles négociations, les lentes réconciliations.

L'agitation, l'opportunisme, le dirigisme, n'ont rien à faire là-dedans.

Va-t-en Nicolas, sors d'ici, n'entre pas dans mon intimité, dans mon histoire de vie.

Je ne t'ai pas choisi, tout en toi me choque et me heurte. Tout en toi m'inspire défiance et mépris.

Je vis ton intrusion dans la sphère familiale comme une insupportable et ultime provocation. Je réagis en louve, l'échine dressée, les dents prêtes à mordre, la raison suspendue.

Va et porte tes diktats, tes lois et tes sbires loin de mon foyer. Arrache mes biens, mène-moi sur la paille, emporte mes rêves d'avenir, laisse-moi sans le sou. Mais ne franchis pas ma porte.



Publié dans L'état de mère

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M
@Philippe95<br /> des "sales mecs" comme toi, j'en veux bien tous les jours :-)<br /> quant à la révolution démocrate, on se la fait déjà là. ça ne se voit pas trop parce que les politiques ne regardent que l'écume des choses, mais sous le niveau de la mer, il y a bien de gros changement qui se préparent !<br /> 2012 ? pfff ! on s'en fout ! leurs échéances ne sont pas les nôtres, c'est ce qui fait notre force : nous sommes moins vulnérables que ces "colosses" aux pieds d'argiles :-))
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P
Marie-Laure,<br /> je devrais avoir honte mais je ne prends pas toujours le temps de lire tes blogs, surtout "ton blog de fille". Laisse moi te dire que, en tant que "sale mec", ma première réaction serait de fuir avant de finir le moindre de tes billets. Et puis, non, tu y mets tellement de toi, c'est tellement la vraie vie et ce que devraient être les vrais blogs, que je contemple ça, que j'en suis passablement jaloux et que je te dis "bravo". <br /> Bon, on se la fait quand, cette révolution démocrate ?<br /> Bises. Philippe
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M
Quand l'instinct parle, les mots viennent facilement...
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A
Touchée, je n'ai pas d'autres mots.<br /> Il est fort ce billet.
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M
@Falconhill<br /> Merci beaucoup. Venant de toi, vraiment, ce compliment me fait très plaisir.
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